Bonjour à toutes et à tous, nous espérons que vous avez passé une bonne semaine et bienvenue dans votre dose hebdomadaire d'actualités en affaires publiques offerte par le cabinet VOXA.
Voici les éléments qu'il ne fallait ne pas manquer cette semaine :
La citation de la semaine : " L'écologie, ça commence à bien faire. " - Nicolas Sarkozy, juillet 2012.
L’instant réglementaire
Passage en béton pour le ZAN au Conseil d'État.
Par la loi du 22 août 2021 dite "climat et résilience", le législateur a posé comme objectif ambitieux celui de lutter contre l'artificialisation des sols pour aboutir à sa disparition d'ici 2050. Parmi les nombreuses difficultés juridiques nées de cette loi, figure celle liée au sens qu'il faut donner à la notion d'artificialisation des sols. C'est pourquoi a été inséré dans le Code de l'urbanisme l'article L. 101-2-1, lequel définit l'artificialisation des sols comme « l'altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d'un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage ». Ensuite, concernant l'un des critères permettant de déterminer dans un document d'urbanisme si un terrain est artificialisé ou non, le décret renvoie la décision à un arrêté ministériel... qui devrait lui-même être établi en fonction de standards fixés par un organisme administratif distinct, ici le Conseil national de l'information géolocalisée (organisme rattaché au Ministère de la Transition Énergétique). C'est ce renvoi qui vient d'être censuré mercredi par le Conseil d'État, le décret étant annulé sur ce point au motif qu'il est entaché d'incompétence négative : pour faire simple, le Conseil d'État a rappelé au gouvernement qu'il devait lui-même rédiger les textes d'application de la loi et ne pas confier ce travail à un autre organe de l'exécutif.
Élémentaire, mon cher Christophe ! Il appartient donc à l'exécutif de revoir sa copie et d'adopter de nouvelles dispositions sur ce point, ce qui sera peut-être fait rapidement, la publication de nouveaux décrets d'application de la loi Climat et résilience étant annoncée. En amont des décisions du Conseil d'État sur le ZAN, le ministre de la Transition écologique s'était déjà engagé à une réécriture des décrets après une fronde des élus locaux, prise en compte par la loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols. Il a mis en consultation entre le 25 juillet et le 15 août derniers deux nouveaux projets de décrets prenant en compte le vote de cette loi. L'un sur la territorialisation des objectifs de gestion économe de l'espace, l'autre sur la commission régionale de conciliation sur l'artificialisation des sols. Le gouvernement attendait les décisions du Conseil d'État sur ces deux recours avant de publier les textes. Le ministère de la Transition écologique annonce d'ailleurs la publication du premier d'entre eux avant la fin du mois d'octobre. En effet, le Conseil d'État a, contrairement au volet Sraddet, également annulé une disposition du deuxième décret ZAN, relatif à la nomenclature de l'artificialisation des sols, concernant l'échelle à prendre en compte pour identifier les zones artificialisées.
« Le gouvernement, en faisant simplement référence à des "polygones", sans donner de précisions suffisantes sur la manière dont ceux-ci seraient déterminés et appliqués, n'a pas satisfait à l'obligation résultant de la loi, qui lui imposait d'établir l'échelle à laquelle l'artificialisation des sols doit être appréciée dans les documents de planification et d'urbanisme », explique le Conseil d'État dans un communiqué. À la lecture de ces décisions (et malgré le coup d'État/coup d'éclat/coup de com' de Laurent Wauquiez), le gouvernement peut s'estimer satisfait. L'annulation [par le Conseil d'État] porte sur un point technique, en aucun cas elle ne remet en cause le bien-fondé de la réforme. Pour rappel, en dix ans, 24 000 hectares d'espaces naturels, agricoles et forestiers ont été artificialisés chaque année en France, soit près de 5 terrains de football par heure. L'objectif de la loi Climat et résilience, votée en 2021, c'est qu'en 2050, pour chaque espace consommé, l'équivalent soit rendu à la nature. Car sinon, l'eau s'infiltre moins, le carbone n'est plus stocké, et la biodiversité est menacée.
Décryptage
ZAN : team Béchu/Borne 1, team Lisnard/Wauquiez 0.
Ce fut l'un des sujets phares des dernières élections sénatoriales. L'Association des maires de France l'a évoqué à plusieurs reprises : le zéro artificialisation nette (ZAN) et « son impérative réforme ». Communiqués, tribunes, recours, on ne donnait pas cher du dispositif tant décrié... Et pourtant, le Conseil d'État a rejeté le recours de l'Association des maires de France (AMF) mercredi contre le décret du 29 avril 2022 relatif aux objectifs en matière de gestion économe de l'espace du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet). La Haute Juridiction estime que la fixation des objectifs de maîtrise de l'artificialisation des sols à l'échelle régionale, dans le cadre des Sraddet, avec une déclinaison dans les documents locaux d'urbanisme avec un rapport de compatibilité, est conforme à la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique qui a fixé l'objectif ZAN à l'horizon 2050.
Et Laurent Wauquiez entre en jeu pour lancer le "Wauquiexit"
Fin du match ? Non. C'est sous la forme d'une étrange erreur de communication que Laurent Wauquiez a cru bon faire son retour médiatique avec le ZAN dans son viseur. Le timing : 4 jours avant la décision du Conseil d'État. La forme : un style rappelant Trump, en somme « c'est de droite, rien ne va » comme le dirait Juliette Armanet.
Laurent Wauquiez a annoncé samedi dernier qu'il retirait sa région de la loi contre la bétonisation des sols. Peut-on espérer que l'aspirant à l'Élysée teste encore ses formules et qu'il ne s'agit pas ici de la base de sa future campagne présidentielle ? Oui, "rien ne va" dans son coup d'éclat de samedi, devant les maires ruraux de France, réunis à l'Alpe d'Huez à l'occasion de leur congrès. Sur la forme, d'abord. Après le Brexit, voici le « Wauquiexit » ! Ou comment appliquer les lois à la carte, ou selon les variations des sondages... Mieux encore, plus fort que les autonomistes kanaks, les opposants à Notre-Dame-des-Landes, voici Laurent Wauquiez, le zadiste du Puy-en-Velay ! Chantre de la droite forte, qui réclame toujours plus d'ordre, hurlant contre les "terroristes verts" après l'épisode des bassines de Sainte-Soline, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes se dit fier de s'opposer à la loi.
Plus impressionnant qu'un stand « 6ème République » au congrès des Verts du Havre, Laurent Wauquiez intègre donc la désobéissance civile dans les compétences régionales. Mais que valent les valeurs et la constance quand il s'agit de faire un coup politique ? Avec des mots forts, menton levé et bras vengeurs, il marque son retour sur la scène nationale. Mais a-t-il relu le volume 1 du droit constitutionnel, disponible à la bibliothèque de la fac de Lyon 2 pour les étudiants de première année ? Car une région n'a pas le pouvoir de contrer une loi votée par le Parlement. Sinon, le préfet se substitue à la région ! Il aurait été intéressant d'interroger également, dans le même timing, les députés et sénateurs LR, qui ont voté cet été des aménagements pour rendre la loi ZAN moins contraignante. A-t-il lu les 80 amendements déposés par le sénateur Blanc ? (voir précédentes newsletters)
La nuit de l'écologie et le crépuscule :
Qu'importe le fond, qu'importe les considérations "technos", on parle de tactique et de communication, Monsieur ! On s'adresse aux vrais gens ! Laurent Wauquiez a parfaitement identifié le nouveau thème sur lequel surfer pour 2027. Globalement, le climat politique est en train de changer en Europe. Un peu partout, les partis populistes d'extrême droite progressent en contestant les mesures environnementales au nom de la défense du pouvoir d'achat des plus modestes. En Allemagne, le parti d'extrême droite, l'AFD, défend les chaudières à gaz ou au fioul. Aux Pays-Bas, un jeune parti agrarien défend l'agriculture extensive et les pesticides et pourrait remporter les législatives en novembre. Au point que le gouvernement rétrograde un peu sur ses ambitions, expliquant sa réticence à inscrire la loi de programmation agricole alors que le texte "Ferme France", voté en juin, favorise les lobbies agricoles. De quoi donner des idées à Wauquiez : on sort à peine de la séquence planification version Macron, Bruno Le Maire doute des contraintes sur les passoires thermiques. Alors Laurent Wauquiez s'engouffre dans la brèche et fait de l'écologie sa cible, car le RN devient incontournable dans les zones rurales, car les mots « Gilets » et « Jaunes » vont toujours bien ensemble et qu'aucune vision cohérente en matière de transition écologique n'a jamais vraiment émergé à droite. Autant s'y opposer ! Chacun a son syncrétisme à la Sarkozy : pour Darmanin, c'est le Karcher, pour Wauquiez, c'est l'écoloscepticisme. Le 10 octobre prochain, le parti de Laurent Wauquiez organisera sa toute première « Nuit de l'écologie », pour poser les bases d'une « écologie de droite ». Elle n'est pas « positive », « responsable », « non décroissante », « non punitive », mais pour le moment, elle reste très vague... Une chose est sûre, en attendant cette « nuit de l'écologie », le crépuscule des dieux écolos était de mise à l'Alpe d'Huez ce week-end.
Sur la scène politique :
Le projet de loi sur la fin de vie en réanimation.
Ni l'Élysée, ni la ministre Agnès Firmin-Le Bodo, ne donnent la moindre indication. Et le texte transmis n'est qu'une version provisoire : il laisse au président le soin de trancher les modalités de « l'aide active à mourir ». Pourtant, Emmanuel Macron s'est engagé à légiférer sur la fin de vie, mais l'exécutif tarde à dévoiler son texte. Toujours pas de décision malgré la récente visite du pape lors du dernier conseil des ministres mercredi dernier. La Convention citoyenne sur la fin de vie a rendu ses conclusions en avril, il y a six mois. Emmanuel Macron avait promis de "bâtir" un texte pour la fin de l'été. Mais il va falloir attendre au moins une, peut-être deux semaines, peut-être plus. En fait, la majorité est suspendue au bon vouloir d'Emmanuel Macron. Et plus le chef de l'État attend, plus il semble douter. Qui pour administrer la mort : la personne en fin de vie elle-même... Mais si elle n'en est plus capable physiquement ? Un proche, un soignant ? Parle-t-on de suicide assisté, d'exception d'euthanasie, ou bien des deux ? Sachant que cela ne doit ni empiéter sur la clause de conscience des personnels soignants, ni se faire au détriment des soins palliatifs. Bref, un sujet immensément complexe, personnel, profondément introspectif et potentiellement source de nouveaux clivages, notamment auprès de l'électorat catholique que l'Élysée souhaite convaincre.
Il se heurte ainsi aux réticences de la droite et d'une partie du monde médical hostile à l'euthanasie. De l'autre côté, la gauche, dont le soutien pourrait être décisif pour l'adoption du texte à l'Assemblée nationale, n'entend pas se contenter du suicide assisté. Les limites du « en même temps » sont toujours présentes... Le principal point qui reste à trancher, c'est l'instauration d'une aide active à mourir. Les trois quarts des membres de la Convention citoyenne se sont prononcés en sa faveur. Mais le chef de l'État est tenté de se contenter d'introduire un "droit" à l'accès au suicide assisté. C'est-à-dire à la possibilité pour un patient majeur, atteint d'une maladie incurable avec un pronostic vital engagé à court terme, de se voir prescrire un produit létal pour se donner lui-même la mort. Mais quid du sort des malades condamnés incapables de s'administrer eux-mêmes le produit ? Emmanuel Macron rechigne à autoriser un tiers à pratiquer ce geste, ce qui reviendrait à légaliser l'euthanasie. Pourquoi autant d'hésitations ? Après tout, la maîtrise du temps relève de sa compétence. Mais la fin de vie dépasse sa fonction. Pendant ce temps, toute la société semble figée dans l'attente de sa décision définitive. Le président a des états d'âme et ne s'en cache pas. Ses opinions évoluent... toutefois moins vite que la société française sur la question. Pour mémoire, nous vous rappelons les résultats des votes de la convention citoyenne : « L'accès à l'aide active à mourir doit-il être ouvert ? » Oui, à 75 %. Comment ? Suicide assisté : 72 %. Euthanasie : 66 %.
Au fond, Emmanuel Macron redoute que ce qu'il présente comme la grande réforme sociétale de son second mandat ne divise la société, et peut-être même sa majorité. Pourtant, selon les sondages, une nette majorité de Français semble favorable à l'instauration d'une aide active à mourir. Emmanuel Macron a plus de mal à trancher, c'est un fait
Le calendrier du parlement :
L'agenda parlementaire de la semaine à l'Assemblée nationale :
> À 16 heures :
- Mesures d’urgence relatives aux négociations commerciales dans la grande distribution.
- Suite Pt Sénat visant à sécuriser et réguler l’espace numérique.
> À 21 h 30 : Suite ordre du jour de l'après-midi.
Mardi 10 Octobre :
> À 15 heures :
- Questions au Gouvernement.
- Vote solennel : Pt Sénat pour le plein emploi.
- Éventuellement, CMP Pt orientation et programmation du ministère de la justice 2023-2027.
- Éventuellement, CMP Pt organisation ouverture, modernisation et responsabilité du corps judiciaire.
- Éventuellement, CMP Pt industrie verte
> À 21 h 30 :
- Nouvelle lecture Pn visant à garantir le respect du droit à l'image des enfants (1229). (3)
- Suite Pt Sénat visant à sécuriser et réguler l’espace numérique.
Mercredi 11 Octobre
> À 15 heures : Suite Pt Sénat visant à sécuriser et réguler l’espace numérique.
> À 21 h 30 : Suite ordre du jour de l'après-midi.
Jeudi 12 Octobre
> À 9 heures :
- Soutenir les femmes qui souffrent d'endométriose.
- Suppression ou suspension des allocations familiales pour les parents d'enfants criminels ou délinquants.
- Baisser la facture énergétique des Français et des entreprises.
- Interdiction de l'écriture dite « inclusive ».
- Création d'un complément de revenu pour les étudiants qui travaillent.
- Résolution (art. 34-1 de la Constitution) invitant le Gouvernement à accorder l'asile politique à Julian Assange.
- Renforcer le contrôle des déclarations de minorité des étrangers.
> À 15 heures : Suite de l'ordre du jour du matin.
> À 21 h 30 : Suite de l'ordre du jour de l'après-midi
Vendredi 13 Octobre
> À 9 heures : Suite Pt Sénat visant à sécuriser et réguler l’espace numérique.
> À 15 heures : Suite ordre du jour du matin.
> À 21 h 30 : Suite ordre du jour de l'après-midi.
L'agenda parlementaire de la semaine au Sénat :
Lundi 9 Octobre :
> À 14h30 et le soir :
- Débat sur l'accession à la propriété
- PPL Attribution des logements sociaux
- PPL Sécurité des élus locaux et protection des maires
Mardi 10 Octobre
> À 15h :
- Questions d'actualité au Gouvernement
> À 16h30 :
- Éventuellement, suite PPL Sécurité des élus locaux et protection des maires
- CMP PJL Orientation et programmation du ministère de la justice 2023-2027
- CMP PJLO Ouverture, modernisation et responsabilité du corps judiciaire
- CMP PJL Industrie verte
- Débat relatif à l’augmentation de la taxe foncière
- > Le Soir : Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 26 et 27 octobre 2023
Mercredi 11 Octobre
> À 10h30 :
- Questions orales
Le politique de la semaine :
Et de 5 !
Gérard Larcher, né en 1949, est une figure politique française majeure. Membre de plusieurs partis de droite, il a présidé le Sénat à plusieurs reprises depuis 2008. Élu maire de Rambouillet en 1983, il a également servi en tant que ministre délégué au Travail entre 2004 et 2007. Après une défaite en 2011, il a retrouvé la présidence du Sénat en 2014, puis a été réélu en 2017, 2020 et 2023. Reconnu pour son rôle de rassembleur, Larcher a joué un rôle clé dans les négociations politiques et les réformes institutionnelles.
C'est tout pour cette semaine ! N'hésitez pas à partager cette newsletter avec vos collègues et à nous contacter pour toute question ou besoin de clarifications. On se retrouve vendredi prochain. À bientôt !